Histoire de la Martinique
Les premiers peuples issus du plateau des Guyanes seraient arrivés en Martinique vers 5000 avant J.C. sans se sédentariser. Environ un siècle avant l’ère chrétienne, les Arawaks (ou Taïno) s’installent réellement en Martinique et s’en font chasser prêt de 1000 ans plus tard par de farouches guerriers, les Indiens Caraïbes.
En 1502, Christophe Colomb débarque en Martinique (Matinino ou Madinina), mais aucun européen ne s’y installe.
L’Espagne, premier pays européen à s’être lancé dans l’entreprise coloniale ne réussit pas à s’emparer des petites Antilles. Elle subissait en effet une résistance menée par les Caraïbes sous forme de guérilla (c’est la raison pour laquelle on ne parle pas espagnol aux petites Antilles).
Cependant ces guerres à répétition finirent par affaiblir les Caraïbes, laissant le champ libre aux nouveaux empires coloniaux : La France, l’Angleterre, la Hollande et le Danemark.
En 1635, sous la direction du corsaire Pierre Belain d’Estambuc, les Français débarquent à l’anse du Carbet sur la côte caraïbe. Jacques Dyel du Parquet (1606 -1658 ), deuxième Gouverneur et lieutenant général de la Martinique, décide en 1639 de partager l’île en deux : le domaine des Caraïbes sur la partie orientale-atlantique, le domaine des français sur la partie occidentale-caraïbe. La cohabitation parfois difficile entre Caraïbes et Français dure jusqu’en 1658. Lors d’une ultime guerre, les indiens Caraïbes de Martinique sont exterminés. Une extrême minorité fuit vers d’autres îles telles que Saint-Vincent et les Grenadines grâce à la solidarité inter-île des indiens Caraïbes. La puissance coloniale s’empare ainsi de la partie orientale-atlantique. Il existe encore des tribus amérindiennes sur les îles avoisinant la Martinique telles que la Dominique et Saint-Vincent.
Dès 1639, les Français commencent à cultiver la canne à sucre, mais face au climat tropical, à la dureté de la tache, et à une sensibilité aux maladies locales, ils doivent trouver un autre moyen de travailler la terre.
Sous l’impulsion du cardinal Richelieu, la traite des Noirs et leur mise en esclavage débute en 1642. Les conditions d’esclavage des Noirs étaient extrêmement pénibles. Dès 1666, des nèg mawon (marrons ; d’où provient le terme "marronage" qui signifie : fuite hors des habitations ) s’était déjà rebellés. Colbert estime que la colonie doit servir les intérêts de la métropole. Il légalise la traite des Noirs en 1670 et établit le Code Noir en 1685. C’est durant cette période que s’est mit en place un système appelé le commerce triangulaire : les bateaux partent de ports métropolitains - Nantes, Bordeaux, La Rochelle… - pour rejoindre les côtes de l’Afrique occidentale. Les biens manufacturés sont échangés contre de futurs esclaves puis les bateaux négriers reprennent leur route pour se rendre aux Caraïbes. Les pertes sont importantes durant les traversés, principalement dues aux conditions de voyage des esclaves dans les cales des bateaux... A l’arrivée, les esclaves sont mis à la disposition du pouvoir colonial en échange des produits de l’industrie latifundiaires (les habitations sucrières produisent de la canne et la transforme en sucre). Le troisième voyage débute alors, cap sur le point de départ : les ports métropolitains. La boucle est bouclée.
La société esclavagiste se construit ainsi pendant environ 200 ans. Les tensions ne cessent d’exister durant cette période.
La Martinique a été occupée par les anglais de 1762 à 1763, puis de 1794 à 1802. En 1794, alors que la Convention avait aboli l’esclavage, les anglais l'ont rétabli. Bonaparte en récupérant l’ile par le Traité d’Amiens en 1802 ne change pas la situation.
Sous l’empire donc, le commerce continue. Le sucre de canne est mis en concurrence avec le sucre de betterave. Les terres moins fertiles et les îles perdant leur monopole, deviennent moins rentables. La part des esclaves natifs de l’île (esclaves créoles) s’agrandit tandis que celles des esclaves amenés directement d’Afrique (esclaves bossales) diminue. Les soulèvements tels que la révolte des esclaves du Carbet en 1822 continuent. Haïti se libère du jouc colonial et prend son indépendance en 1804. La France reconnaît cette indépendance en 1825. Le mouvement abolitionniste prend de l’ampleur en métropole, notamment lors de la pétition des ouvriers de Paris en 1844 demandant l’abolition immédiate.
L’esclavage est aboli pour la seconde fois en avril 1848. Grâce au soulèvement d'esclaves partis du Prêcheur et sous l’impulsion de Victor Schoelcher, le décret de l’abolition est préparé. Cependant la pression des esclaves est si forte que l’on déclare leur émancipation immédiate. Décret du 27 Avril 1848 : Victor Schoelcher déclare que la politique coloniale française a toujours été la même. Elle est toujours basée sur les principes de la France qui n’admet pas plus aux Antilles que dans la métropole de distinction entre ses enfants, qui leur reconnaît à tous les mêmes droits et leur impose à tous les mêmes devoirs . Le gouvernement de Napoléon III accorde aux anciens propriétaires d’esclaves une indemnité égale au tiers de la valeur de leurs anciens esclaves. [NB : L’esclavage a été reconnu comme crime contre l’humanité par la loi du 10 mai 2001]
La société post-esclavagiste qui se met alors en place engendre des changements relativement importants en Martinique. Les ex-esclaves deviennent ouvriers ou paysans. On leur propose de rester travailler autour des habitations en les logeant, et en leur procurant un espace pour cultiver leur jardin créole. Mais un besoin de main-d’œuvre supplémentaire se fait ressentir. La création de la Banque de la Martinique en 1851 constitue un appel d’air pour cette main d’œuvre, notamment les indiens (souvent appelés kouli encore de nos jours), environs 9 000 africains (appelés Congo à l’époque) et un millier de chinois en provenance de Shangaï et Guangzhou. En 1855 l’Arrêté Gueydon établit une stricte réglementation du travail pour les anciens esclaves.
La période qui suit montre d’une volonté politique de participer au débat nationaux français. La loi du 4 Septembre 1870 stipule que les assemblées parlementaires de la IIIème République comprennent en leur sein des représentants antillais. En 1872, le Conseil vote la gratuité de l’enseignement primaire à la Martinique. Le collège national devient le Lycée de Saint-Pierre . Le 24 Novembre 1874 le Conseil Général de la Martinique formule le vœux suivant: les habitants de la Martinique et de la Guadeloupe sont Français de droit, de langage, de coutume et de cœur. Il y a donc lieu de les soustraire au régime exceptionnel, et de les faire jouir des lois et de l’administration de la mère-patrie . Le 7 Décembre 1882, les conseillers généraux demandent que la Martinique soit constituée le plus tôt possible en département français. Le 15 Juillet 1890 les sénateurs Jules Isaac de la Guadeloupe et Vincent Allègre de la Martinique déposent un projet de loi, tendant à classer la Martinique et la Guadeloupe en départements français. Ce projet n’est finalement pas adopté.
La fin du XIXème siècle est marquée par la crise sucrière. Ainsi à partir de 1884, l’immigration indienne cesse petit à petit.
Le 8 mai 1902, l’éruption de la montagne Pelée fit 30 000 morts dans le chef-lieu de l’époque, Saint-Pierre. Le mémorial de la catastrophe de 1902 et très bien conçu et nous vous invitons vivement à le visiter. Fort de France (ex Fort Royal qui prit définitivement le nom de Fort de France en 1848) devint alors la nouvelle capitale économique, politique et intellectuelle de l’île.
Un sentiment d’appartenance à la mère-patrie s’empare d’une partie de la population. De nombreux martiniquais sont mobilisés au combat en 1914 et 1600 d’entre eux périrent sur les champs de bataille.
En 1922, une loi limitant l’importation du sucre et du rhum des Antilles est promulgué. Des crises se succèdent dans le secteur sucriers. Elles sont dues à de nombreux facteurs qui influent sur l’offre, et la demande mondiale (guerres donc besoin d’alcool, sucre de betterave, concurrence etc).
En 1945, Aimé Césaire devient député-maire de la mairie de Fort-de-France. L’un des objets de son mandat est d’obtenir la départementalisation. Celle-ci est, selon lui, une direction prise par mesure d'assainissement, de modernisation, et pour permettre le développement économique et social de la Martinique. Cette dernière devient département français par la loi du 19 mars 1946. La sécurité sociale est instaurée sur l’île un an plus tard.
Le déclin de l’industrie cannière commence durant cette décennie. Cependant le protectionnisme d’après-guerre joue un grand rôle dans l’essor de l’industrie bananière. En effet les quotas assurent aux agriculteurs martiniquais de vendre une certaine quantité de leur production.
Une forte vague d’émigration suivit au début des années 1960, le BUMIDOM(1) organisant la venue en France d’une partie de la jeunesse martiniquaise à la recherche d’un avenir professionnel autre.
Un certain apaisement du climat social s’installe lors de la promulgation de la loi de décentralisation de 1982, qui fait du département Martinique une région mono-départementale française. Des compétences nouvelles sont donc attribuées aux élus martiniquais qui se doivent désormais de mettre en place un modèle de développement pour la Martinique.
Un référendum concernant l’évolution institutionnelle de la Martinique est organisé le 7 décembre 2003. L'institution régionale et l'institution départementale fusionneraient en une institution unique. Cette proposition a été rejetée en Martinique à 50.48%.
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(1) BUMIDOM : Bureau pour le développement des migrations dans les départements d'outre-mer